• Voici enfin le texte écrit pour le défi de Naeri.

    Je tiens à préciser que c'est un texte assez difficile, au sujet douloureux, et je remercies fortement Naeri pour sa patience, et son thème "Tout termine toujours comme ça..." vraiment évocateur pour moi !

    Sur ces quelques mots, je vous laisse à la lecture.

                                                                          

     

    Tout termine toujours comme ça.

    Le savoir ne m'a jamais vraiment fait peur. Du moins, pas avant le diagnostic.

    Au fond, le plus dur, c'est de l'accepter.

    Et alors que j'entends les pas de courses raisonner dans le couloir, j'ai comme une envie de pleurer.

    Parce que ce bruit ne signifie qu'une seule chose, en soins palliatifs : la mort a frappé. Encore.

    Ça a beau être constant, c'est toujours difficile de se dire qu'une personne a perdu la vie.

    Comme par exemple, la merveilleuse grand-mère qui n'a pas eu la chance de dire au revoir à sa famille, mais qui a eu celle de ne pas connaître le nom du service de soins dans lequel elle se trouvait. Cette merveilleuse grand-mère que l'on aurait pu soigner facilement, si seulement sa maladie avait été signalée quelques mois auparavant, et pas au dernier moment.

    Comme ce papa, qui ne s'est jamais réveillé du coma dans lequel il était plongé, suite à un banal accident de la route, alors qu'il n'était même pas fautif. Ce papa qui n'a pas pu choisir de rester auprès de sa femme et de ses filles.

    Où ce petit garçon de trois ans, qui n'a pas eu le temps d'apprendre le principe de la vie. Et qui était trop faible pour lutter un peu plus contre la mucoviscidose.

    Vous l'aurez compris, on entre jamais au service de soins palliatifs pour en ressortir. Lorsque l'on y arrive, c'est tout simplement qu'il n'y a plus d'espoir, que la médecine est impuissante contre la maladie.

    Ici, on se contente juste de se reposer, puis de se laisser partir.

    D'un côté, je suis contente de ne plus avoir à supporter les traitements lourds, les interventions chirurgicales, et les rechutes. C'est trop difficile de se battre, quand on en a plus la force.

    J'aurais pu maudire mon état, ma vie, le monde entier pour ma maladie et mon destin, mais cela n'aurait fait qu'assombrir les quelques jours de vie qu'il me restait.

    Parce qu'au fond, la vie vaut le coup d'être vécue.

    Ne serais-ce que pour recevoir un peu d'amour.

    Et même si je finirais par m'éteindre, n'ayez aucune pitié pour ma jeunesse.

    J'aurais au moins eu la chance de ne pas connaître la vieillesse.

    J'ai vécu heureuse, et je m'en irai heureuse.

                                                                          

    N'hésitez pas à laisser un petit mot !

    Sasha.

     


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  • Voici le texte écrit pour le concours de Naeri. Les cents mots sont bel et bien là, comme indiqué dans les règles !

                                                                                                                                              

    La douleur d'un enfant

     

    Drabble 1 - Naeri

     

    Un hurlement quitta les lèvres qu'il tentait désespérément de garder closes.

    La douleur, intense, l'empêchait de garder le silence.

    Il sentit la ceinture de son bourreau lacérer son dos nu violemment, puis l'entendit s'élever pour revenir avec plus d'ardeur.

    Sa peau semblait prendre feu, et il repoussa un haut-le-cœur en sentant le liquide poisseux et vital quitter sa chair pour couler hors de ses plaies.

    Il se sentait si mal.

    Et abandonné.

    L'adolescent pria pour que quelqu'un intervienne, alors que dans un énième halètement, il se sentait sombrer dans les noirceurs de l'inconscience.

    De toute façon, personne n'était jamais venu.

                                                                                                                                              

    Je profite de ce texte assez sombre pour vous rappeler que le 119 est un numéro national d'urgence gratuit joignable tous les jours de l'année à toute heure. Il permet généralement de signaler tout type de violences subies par des enfants dans tous milieux confondus (famille, institution, rue...). En composant ce numéro, vous pouvez choisir de rester anonyme, votre discussion est confidentielle.

    En cas d'incertitude, signalez tout de même votre suspicion.

    Je compte sur vous pour faire passer le message,

     

    Sasha.


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  •  

    Voici le texte rédigé pour le concours de Reindeer.

    Le sujet est le suivant : Je fixai mes chaussures. La toile détrempée semblait sale. Le ciel pleurait tout son saoul et je n'avais rien pour me protéger. La pluie dégoulinait le long de mes cheveux et de la buée s'élevait à chacune de mes respirations. Le quai était désert, mort. Pourtant, le bruit d'un train me parvenait, au loin. Enfin il arrivait. Je sautillai légèrement, tentant de réchauffer mes pauvres os gelés. J'allais enfin partir de cet endroit maudit.

    N'hésitez pas à donner votre avis.

     

    Le billet

     

     

    Il était entre mes mains. Enfin. Ce petit billet tant convoité qui m'avait coûté toutes mes économies. Je n'avais plus un sou, même pas de quoi m'acheter un ridicule petit sandwich à l'épicerie du coin, mais qu'importe. J'allais enfin quitter ce lieu. Demain.

     

    J'allais partir loin, très loin d'ici. J'allais quitter mon enfance, abandonner les quelques personnes qui croyaient en moi, et laisser une partie de mon âme dans cet endroit. J'allais entamer une nouvelle vie, mes gloires et mes chutes resteraient loin derrière moi.

     

    *

     

    C'était un mardi matin. Le ciel semblait tomber en lambeau, se fondant en une multitudes de gouttelettes et invitant le brouillard à nous dissimuler. À nous cacher des yeux du monde entier. Cette ville miteuse n'avait rien à envier, on n'y rencontrait jamais de nouvelles têtes. Juste de pauvres gens dont les friches tombaient en morceaux.

    Et pendant que je traversai courageusement les rues, ce ne fut que le vide qui m'accueillit. Le vide, sans un seul signe de vie. J'eus beau être heureuse de marcher entre ces vieilles bicoques branlantes, d'être aussi proche de quitter cet endroit, je fus aussi terriblement triste de partir sans mes amis. Sans avoir l'espoir de les revoir un jour.

    Le froid semblait me ronger la peau, l'hiver se montrait plus présent de jour en jour. Et le vent qui l'accompagnait n'était en aucun cas clément.

    C'est avec joie et empressement que j'entrai dans ce qu'il restait de la gare : quatre murs démolis, un toit invisible, et un sol recouvert de gravats. Ma maladresse habituelle me souffla de rester prudente, et c'est ainsi que je progressai lentement dans les ruines du bâtiment.

    Arriver sur le quai ne fut pas une mince affaire. Mais le plus important pour moi fut d'y être.

    Contrairement au bâtiment, lui était dégagé, plat et tout à fait banal. Bien sûr, ce n'était qu'une simple étendue de béton autour d'un unique rail, mais c'était suffisant.

    L'attente me parut interminable. J'avais tellement froid que mes dents ne cessaient de claquer.

    Je fixai mes chaussures. La toile détrempée semblait sale. Le ciel pleurait tout son saoul et je n'avais rien pour me protéger. La pluie dégoulinait le long de mes cheveux et de la buée s'élevait à chacune de mes respirations. Le quai était désert, mort. Pourtant, le bruit d'un train me parvenait, au loin. Enfin il arrivait. Je sautillai légèrement, tentant de réchauffer mes pauvres os gelés. J'allais enfin partir de cet endroit maudit.

    Il s'arrêta tout prêt de moi, et je me précipitai sur l'une des portes pour m'engouffrer dans un wagon quelconque. Dans ma précipitation, je percutai un homme et m'empressai de m'excuser. Mais ce dernier me fixait avec tellement de mépris que je ne me sentis pas capable de finir ma phrase. Le regard noir, le crâne dépourvu de cheveux, il avait une carrure impressionnante. Pas de doute que cet homme mangeait chaque jour plus que nécessaire. Et son impeccable costard noir me prouvait que lui avait bien trop d'argent.

    D'une poigne, il saisit mon tee-shirt délavé et tâché, le plus présentable que j'avais trouvé, avant de me traîner sur quelques centimètres. Puis, il me cracha :

    - Nous n'avons pas besoin d'une misérable dans nos rues !

    D'un seul coup, mon dos heurta le sol, et ma tête eut une collision violente avec ce dernier. Un horrible goût de rouille emplit ma bouche. Le goût du sang. Mais qu'importe.

    En voyant les portes se refermer, je compris que je ne me trouvai plus dans le train.

    Et avec désespoir, je constatai que je n'avais même plus mon billet entre les mains.

    La machine à vapeur s'éloigna sans que je n'ai la force de faire un geste, me laissant seule sur ce quai si vide.

    J'avais mal. Partout. Mais le plus dur à supporter fut la déchirure de mon cœur.

    Je ne pourrais jamais quitter cet endroit.

    Sous la pluie dégoulinante, il me ne restait plus que mes larmes pour pleurer.

     

    Sasha.

     

     


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  • Hey !

    J'ai retrouvé ce prologue dans mes fichiers il y a quelques temps, et je me suis dit : "pourquoi ne pas le partager ?"

    Je l'adore, vraiment, mais je n'ai pour le moment trouvé aucune suite cohérente et intéressante.

    Bon, il a prit la poussière et mérite quelques retouches, mais j'avais envie de vous le présenter ainsi.

                                                                                                                                              

    Prologue :

    Je ressers la crosse du pistolet dans ma paume, sans succès. Mes mains moites ne servent qu'a faire glisser l'arme, et les tremblements qui agitent mon corps ne m'aident pas à viser ma cible.

    Je ne me suis jamais servie d'une arme, ce qui ne me garanti pas que je puisse atteindre mon objectif, même si celui-ci ne se trouve qu'à trois mètres de moi.

    C'est ma vie contre la sienne, je préfère sauver la mienne, mais je ne suis pas sûre de pouvoir tirer avant lui.

    L'homme qui me fait face est aussi immobile qu'un piquet, les jambes écartées, il tient son arme à deux mains, et je ne cesse d'avoir peur du canon qui reste pointé sur moi. Il ne tremble pas, il est sûr de lui, tandis que moi j'hésite encore, pourrais-je avoir le courage de tuer un homme ?

    De toute évidence, lui aurait le courage de m'achever sans le moindre effort.

    Mes jambes sont flageolantes, j'ai tenté de les immobiliser sans succès, et je ne parviens toujours pas à me concentrer.

    Je glisse mon index sur la détente, sans trop savoir ce que je fais, je ne veux pas être une meurtrière, je ne l'ai jamais voulu.

    Plus les minutes passent, plus j'ai l'impression que mon corps s'allourdit.

    Je voudrais m'en sortir, sans avoir à tirer, sans avoir à tuer.

    Je n'ai pas la force de chercher le courage qui sommeil en moi, je n'ai pas la force de faire cela.

    Mes yeux croisent les siens pour la première fois. Ce regard me semble si familier, et pourtant si inconnu à la fois.

    Peut-être que finalement, je préférerais être tuer plutôt que de devoir tuer.

    Je ne sais pas comment m'en sortir, je n'ai plus le courage de continuer ainsi.

    J'entends un bruit sourd, le bruit de mon pistolet retombant à terre, je ne suis pas une meurtrière.

    Je laisse mes bras retomber le long de mon corps, et je sens mes genoux écorchés toucher le sol.

    Mes yeux se ferment, et maintenant ?

    Je suis à genoux devant cet homme, attendant la mort.

    Je n'ai pas peur, étrangement, je ne suis pas effrayée de passer de l'autre côté. La seule chose qui m'effrai, c'est ce silence qui s'éternise.

    Comme s'il cherchait à me faire perdre mes moyens.

    J'entends un déclic, puis un bruit assourdissant, comme une explosion.

     

    Mais pourquoi ne pas commencer par le début ?

                                                                                                                                              

    Qu'en pensez vous ?

    Sasha.


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  • Voici le texte que j'ai écris pour le concours de Naeri. N'hésitez pas à me donner votre avis.

    Bonne lecture.

     

    L'enfant des rues.

     

    Une histoire d'image - Naeri

     

    Evan était un enfant des rues. D'aussi loin que ses souvenirs remontaient, il avait toujours dormi sur un petit carton pour garder sa chaleur, et observé les étoiles en attendant que le sommeil le rejoigne.

    Et aujourd'hui, a vingt ans, peu de choses avaient changé.

    L'hiver était déjà bien installé, mais le froid ne l'atteignait presque pas. Son organisme avait eu le temps de s'habituer aux températures extérieures, quel que soit le temps, mais il faut dire que son épais gilet fourré lui apportait la chaleur nécessaire pour affronter la saison.

    La faim ne le tiraillait que rarement grâce à ses jolis yeux bleus, la boulangère ne résistait jamais à son regard, et ne pouvait s'empêcher de succomber à son charme un peu plus chaque jour. Cette merveilleuse femme lui offrait quotidiennement un sandwich digne de ce nom, avec autant d'ingrédients que possible, pour 'qu'il ne s’amaigrisse pas' disait-elle. Et parfois même, elle lui permettait de se doucher dans l'appartement du dessus, pendant que ses vêtements passaient à la machine à laver.

    Non, Evan n'avait pas le droit d'être malheureux. C'est ce qu'il se disait tous les jours, comme aujourd'hui, en entrant dans la boulangerie. Milles odeurs l'accueillirent, celle du pain chaud, des viennoiseries, des mignardises, et de toute autre chose qu'il ne connaissait même pas. Il se munit de son plus beau sourire lorsque ses yeux rencontrèrent celle de la gérante. S'il n'avait pas été si buté, il aurait sûrement pris les devants pour l'embrasser. Mais la vie ne lui avait pas permis de goûter à cet amour là.

    - Bonjour Evan !

    - Julia, salua-t-il poliment.

    Les yeux de la jeune femme brillaient tandis qu'elle lui tendait son sandwich du jour avec entrain. Elle était si heureuse de lui rendre service chaque jour, qu'il ne tentait même plus de décliner l'offre de temps à autre. C'est donc ainsi qu'il se saisit de la nourriture offerte, effleurant légèrement les doigts de la jeune femme, sentant même l'anneau doré qui décorait son annulaire.

    - Merci beaucoup, Julia.

    Comme d'habitude, la boulangère lui offrit son discours sur la normalité de cet acte, sans qu'il ne prenne vraiment l'attention de l'écouter, il s'en était depuis longtemps lassé.

    Quelques mots furent échangés, mais rien de plus que des formalités, et rapidement, il quitta la chaleur de la boutique pour se faire happer par le vent glacial de janvier.

    Une forte inspiration rafraîchit ses narines, et satisfit ses poumons. L'hiver était définitivement sa saison préférée. Le froid, l'ambiance des fêtes, la 'chaleur' de la ville encore décorée de milles lumières, rien de mieux que d'observer le visage des enfants qui testaient joyeusement leurs cadeaux de Noël.

    Mais ce matin là, ce n'était rien de tout cela qu'il cherchait.

    D'un pas léger, il se faufila de rue en rue, évitant au mieux la foule qui n'appréciait pas toujours la proximité avec un SDF, et adopta un air détaché, alors qu'intérieurement, une petite nervosité l'agitait.

    Ses pensées ne cessèrent de le tourmenter un peu plus à chaque pas effectué, alors qu'il approchait de son but lentement, et tentèrent de lui faire faire demi-tour, sans qu'il ne s'y résolusse.

    Et enfin, il la vit.

    Cette petite rue sombre et étroite, à peine remarquable dans l'ombre, juste assez grande pour laisser passer une silhouette. Evan n'avait jamais compris la nécessité d'un si petit espace, où même une poubelle ne pouvait être glissée.

    S'installant discrètement face à celle-ci, il observa l'être qui l'habitait.

    Un adolescent. Maigre, et si pâle qu'il lui inspirait la bienveillance, et une attraction si unique.

    Longtemps, ses chers 'amis' s'étaient moqués de lui. Lui, le Evan qui affirmait toujours que celui qui protégeait ne pouvait que perdre. Quelle ironie, l'époque de ces dires semblait bien lointaine à présent que de réels sentiments l'attachait à un simple inconnu qu'il n'avait jamais approché.

    Le jeune homme dormait encore sous sa couverture miteuse, c'est pour cela qu'il s'en approcha. Sa respiration était lente, et son visage était détendu de toute émotion. Son petit nez légèrement retroussé était rosi par le froid, de même que ses joues normalement si blanches. Ses cheveux blonds retombaient sur ses paupières qui cachaient ses yeux bleu-gris pour lesquels Evan avait fondu.

    Ce dernier n'hésita pas une seconde à couper son sandwich en deux, déposant la plus grosse part à côté du visage de l'adolescent endormis. Puis, avec un dernier regard, il quitta discrètement la petite ruelle.

    Il savait déjà qu'il reviendrait le surveiller, ce jeune qui n'était là que depuis deux mois.

    *

    Au milieu de la nuit, Evan fut réveillé par une désagréable vague de froid. Son corps ne cessait de trembler, attaqué par le vent glacial de la saison. Il soufflait tellement fort que son visage lui brûlait, même ses yeux s'humidifiaient, menaçant de libérer quelques larmes. Cet hiver là était coriace, et les températures actuelles ne cessaient de chuter, se situant bien en dessous des températures moyennes de saison.

    Mais ce n'est pas de cela dont il se préoccupa.

    Quelque part au fond de lui, une sensation désagréable paraissait le ronger. Comme un mauvais pressentiment qui venait le tourmenter.

    De toute manière, il ne pouvait pas se rendormir par une température pareil, de peur de ne plus pouvoir se réveiller.

    Quelques minutes passèrent sans qu'il ne bouge de son carton, qui ne semblait plus pouvoir le protéger de la froideur du sol, et ses pensées ne cessèrent de tourner autour de ce pressentiment désagréable.

    Puis soudain, quelque chose s'actionna dans son cerveau.

    Se levant difficilement, les membres bien trop engourdis, Evan se débrouilla pour se précipiter entre les rues, abandonnant son campement sans surveillance au risque de le perdre. Les minutes lui semblèrent défiler trop rapidement alors qu'il cherchait son but avec empressement, luttant contre le froid et le vent qui l'attaquaient.

    Il tourna encore dans une nouvelle rue, une de celle illuminée par les bars encore ouverts et très fréquentés d'où la musique filtrait souvent, sans qu'il n'y prête réellement attention. Et enfin, celle qu'il recherchait apparut dans l'obscurité.

    Quelques pas, et il fut devant elle. Elle était plongée dans le noir, dénuée de tout lampadaire, et il lui fallut encore une minute pour s'habituer à l'obscurité du lieu.

    Evan fut soulagé en voyant que la silhouette était encore là, mais ce sentiment ne fut que de courte durée.

    Le jeune homme âgée de dix sept années tremblait de tout son corps. Ses lèvres étaient tellement bleues, et sa peau tellement translucide, qu'il aurait cru que la vie l'avait quitté s'il n'était pas tant secoué par le froid. Ses sourcils étaient légèrement froncés, et son visage crispé prouvait son inconfort, cette souffrance intérieure que Evan comprenait tant.

    Sans hésiter une seconde de plus, l'aîné se précipita sur le plus jeune, se laissant tomber à ses côtés sur le sol. De ses doigts fébriles, il fit descendre la fermeture éclaire de son gilet pour le quitter, et recouvrit les épaules de l'inconnu du tissus rembourré. Et c'est avec délicatesse qu'il le prit tout contre lui, serrant de ses bras la silhouette si frêle de l'adolescent, et tentant de le réchauffer de sa propre chaleur.

    - Réveilles toi, réveilles toi !

    Evan n'ignorait pas la dangerosité d'un sommeil en hypothermie, et la peur ne cessait de ronger son estomac tandis qu'il frottait le dos de l'autre jeune homme de ses mains brûlées par le froid. L'angoisse lui prit la gorge lorsqu'une plainte trop faible franchit les barrières des lèvres de son semblable, mais d'un autre côté, il fut tout de même rassuré de l'entendre.

    Il ne sut pas combien de temps il resta là, assis à même le sol, à le garder dans ses bras. Mais les tremblements avaient diminué d'intensité, et cela le rassurait. Son propre corps semblait se réchauffer de la chaleur qu'ils se transmettaient, même si le sol continuait de lui faire ressentir le froid.

    Le temps s'écoulait lentement, si lentement que la nuit semblait interminable. Et le plus jeune n'était toujours pas conscient. Mais cette fois-ci, ce n'était plus la même chose.

    Son visage s'était détendu, et il paraissait plus apaisé que jamais. Ses traits s'étaient adoucis, sa peau semblait moins agressée par le froid, et ses lèvres avaient repris une couleur proche de la normalité. Il ne faisait que dormir, maintenant, et ses rêves ne semblaient pas le tourmenter.

    Les angoisses d'Evan se calmèrent à cette constatation. Toutefois, ce dernier ne se dégagea pas de cette étreinte. L'homme n'était pas près à l'abandonner encore une fois dans un froid si mordant, il préférait veiller sur le plus jeune jusqu'au levé du soleil.

    Le vent fouetta encore longtemps son visage, et alors qu'il fermait les yeux dans l'intention de stopper le picotement qu'il ressentait, il glissa à son tour dans les bras de Morphée.

    *

    Ce fut un mouvement qui le réveilla. Un mouvement léger, mais percevable à travers son sommeil.

    Et quand il ouvrit les yeux, la première chose qu'il vit fut le visage, bien trop proche, de l'adolescent sur qui il veillait depuis une soixantaine de jours. Ses yeux étaient encore clos, mais Evan devina sans difficulté qu'il n'en serait pas ainsi pour longtemps.

    Délicatement, il brisa l'étreinte qu'il offrait toujours au jeune homme, s'éloignant doucement, presque à regret, mais au fond de lui il savait qu'il reviendrait. L'hiver était loin d'être terminé.

    Quand il fut sur ses jambes, il le contempla encore une fois, détaillant ce corps bien trop fin, bien trop fragile, encore enveloppé dans son propre gilet. Il ne le récupéra pas, se disant que cet inconnu en avait bien plus besoin que lui, alors qu'au fond, il savait bien qu'on ne pouvait passer un hiver vêtu seulement d'un pull fin rongé par les mythes.

    Silencieusement, il prit la direction d'une autre rue, s’imprégnant du soleil déjà haut dans le ciel, avant stopper sa marche brusquement, au son d'une voix encore jamais entendue.

    - Attends.

    Une voix roque encore remplie de sommeil.

    Se retournant lentement, Evan fut devant celui qu'il n'avait jamais osé affronter. Celui qui l'avait toujours troublé. Celui qu'il avait tant surveillé.

    Le temps sembla se suspendre alors que leurs yeux se détaillaient, et en observant le regard du plus jeune, Evan su qu'il avait deviné qui il était. 'L'aidant'.

    Et sans qu'il ne se rende compte, le jeune homme fondit dans ses bras, le serrant aussi fort qu'il le put alors que ses yeux semblaient prêts à libérer quelques larmes.

    - Merci !

    Ce ne fut qu'un murmure, mais ce fut suffisant.

    Evan n'avait jamais été aussi heureux de partager une étreinte.

     

    Sasha.


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